Pour ce deuxième numéro de Versus, j'ai choisi de vous parler de "Jane Eyre" et de ses trois adaptations en film. Pourquoi trois ? Parce que celle de Robert Stevenson avec Orson Welles est la plus charismatique à mon avis, celle de Zeffirelli propose à l'affiche de grandes pointures du cinéma et celle de Fukunaga est la plus récente puisqu'elle sera dans les salles françaises ce mercredi.
Les affiches...
En comparant les affiches, on s'aperçoit qu'elles sont opposées les unes aux autres. La première date des années 40. Elle est dessinée, comme ça se faisait à l'époque. L'écriture manuscrite du titre, en rouge et en italique, donne un caractère dramatique au sujet. Cette écriture possède des caractéristiques particulières comme si l'on voulait donner du rythme. Jane tourne le dos à « son amour » et son visage exprime la crainte et le désarroi. Rochester quant à lui est à moitié dans la pénombre, ce qui évoque son caractère ombrageux et versatile.
L'affiche de Zeffirelli exprime totalement autre chose : la passion. Le titre, également en rouge, se situe au centre de l'affiche cette fois, tandis que dans le lointain se dessine le domaine de Thornfield. Les personnages sont face à face. Jane, yeux mi-clos, se trouve dans les bras de Rochester et laisse sa main reposée sur sa nuque, dans une attitude de totale abandon. Lui la regarde avec un tendre sourire. Tout ceci sur fond noir, comme pour rappeler que cet amour sort de l'obscurité.
Enfin, l'affiche de Fukunaga propose une vision plus moderne : l'opposition des personnages dans l'espace mais aussi dans le traitement des couleurs. Jane, impassible et innocente se trouve en haut de l'affiche. En filigrane, on distingue des feuilles, comme pour évoquer le printemps, les nouvelles pousses et la jeunesse de l'héroïne. Séparés par un titre central très simple, les personnages s'opposent clairement. Rochester est en bas de l'affiche. Cette position évoque-t-elle sa faute de jeunesse ? Jane étant en haut, veut-on nous dire qu'elle lui est supérieure sur le plan moral ? Quoi qu'il en soit, Rochester nous montre un visage contrarié, fronçant les sourcils, exprimant ses tourments. En filigrane, on peut voir cette fois des branches nues qui expriment l'hiver, le froid et le caractère du héros. Il est dans une sorte de brouillard qui n'est pas sans rappeler sa situation personnelle. On peut y voir aussi son expérience, compte tenu qu'il est plus âgé que Jane. Les couleurs pastel, sépia pour Jane, gris bleu pour Rochester, évoquent elles aussi les saisons et la dualité du bien et du mal.
La musique...
La musique de Bernard Herrmann qui nous avait déjà enchanté dans le film « L'aventure de Mme Muir » donne au film de 1944, un côté dramaturgique et lugubre indéniable. L' impression de Jane lorsqu'elle arrive au château est renforcée par le compositeur américain. Ce dernier, a fortement subi les influences majeures de grands compositeurs allant de Debussy et Ravel, en passant par Gershwin pour leur impressionnisme.
Dans un genre différent, Claudio Capponi signe la musique du Jane Eyre de Zeffirelli, pleine d'envolées lyriques, de romantisme. Le piano court tout au long du film, par petites touches parfois tristes, parfois joyeuses. Il est accompagné de violons. Toutefois, cette musique ne tombe jamais dans le mélodramatique. Elle est parfaite !
Pour finir, la musique de la version de 2011, nous propose une vision plus simple, à l'image du film, mais qui aurait pu être plus fouillée à mon goût. Les cordes sont très présentes comme la contrebasse ou le violoncelle, plus léger. Cela reste trop discret, loin d'être omniprésent. On regrettera ce choix, même si l'on comprend que le réalisateur ait voulu mettre les acteurs en avant.
L'interprétation...
Jane Eyre (enfant)
Peggy Ann Garner
Anna Paquin
Amelia Clarkson
Toutes plus remarquables les unes que les autres, les jeunes actrices ayant joué Jane enfant ont été impressionnantes de charisme. Mention spéciale pour Anna Paquin.
Jane Eyre (adulte)
Dans le film de 1944, Joan Fontaine joue le rôle-titre. Elle l'incarne avec beaucoup de détermination et de retenue, dans un savant mélange de force et de fragilité à la fois. Difficile de qualifier cette magnifique interprétation, surtout face au charisme d'Orson Welles. Elle fait preuve d'une grande volonté mêlée à une certaine hésitation qui convient à ce personnage romanesque.
Charlotte Gainsbourg m'a surprise par son interprétation parfois impassible, souvent sans expression. On note quelques scènes où elle est convaincante, mais si peu. Actrice talentueuse, elle joue une Jane Eyre fade malgré un physique qui correspond au roman. Le caractère de Jane et sa vivacité d'esprit ne sont pas perceptibles, dommage.
Quant à Mia Wasikowska, elle joue l'héroïne de Charlotte Brontë de façon discrète, juste comme il faut. Jane a une façon de penser bien à elle et très individualiste. On voit qu'elle en a une vision différente de ses consœurs : elle ne la considère pas comme une victime malgré tout ce qui lui arrive et essaie de lui donner une force de caractère impressionnante. On le voit par ses expressions, son regard et ses postures corporelles.
Edward Rochester
Orson Welles est resté mythique dans ce rôle : comme s'il avait été créé pour lui, il endosse le costume de Rochester de façon magistrale, lui donnant un côté baroque ombrageux. Parfois, on tend même vers le gothique. Avec une voix qu'on croirait sortie d'outre tombe, tant elle est grave, l'acteur force parfois le trait. Cependant, il incarne tellement l'idée que l'on se fait de l'inquiétant Rochester qu'on ne lui en tient pas rigueur. L'aura ambiguë qui l'entoure est inimitable.
William Hurt incarne un Rochester plus brutal, plus soudain et plus rude. La stature du comédien ne correspond pas physiquement mais ne dénature pas le rôle. Là où ça pêche, c'est par la finesse du personnage: il s'apparente davantage à un libertin blasé et déprimé qu'à un être torturé par ses erreurs de jeunesse.
Enfin, Michael Fassbender nous propose un Rochester sombre, inquiétant, narquois, plein de raillerie moqueuse. Physiquement, le plus beau Rochester mais pas le plus conforme au roman.
C'est pas grave car il est très charismatique et correspond bien à l'idée que l'on se fait de la complexité psychologique du héros romanesque.
L'histoire...
[Attention spoilers ! - Ne pas lire à partir d'ici si vous ne voulez pas connaître l'histoire]
L'enfance de Jane
Dans la version de 1944 ainsi que dans celle de 1996, le film débute par une voix-off, celle de Jane Eyre, qui nous plante le décor. Elle a été accueilli à contre cœur par sa tante à Gateshead et élevée en subissant brimades et moqueries, coups et mauvais traitements. La version de Fukunaga procède par flash-back, aucune voix off, juste des scènes primordiales, comme l'enfermement de la petite dans la chambre rouge ou encore les coups subis par John Reed, le fils de la maison. On comprend aussi l'esprit rebelle qui anime
Jane.
La scène où Jane rencontre pour la première fois le cruel Mr Brockelhurst est primordiale : elle permet de voir l'esprit combatif de Jane et sa franchise. Bien respectée dans les trois versions, elle est très courte dans celle de 2011 alors qu'elle dure longtemps dans la version de 1944.
À Lowood, l'institution où la place sa tante, Jane va connaître privations, maltraitances, froid. Tout ceci va lui endurcir le caractère. Elle va également connaître le grand chagrin de perdre son amie Helen Burns. Cette scène nous arrache le cœur dans la version de Stevenson, Zeffirelli nous propose une version expurgée de certains traitements subis par l'enfant, tandis que Fukunaga l'évoque très rapidement. Ce dernier oublie sciemment de parler de Miss Temple, personnage bienveillant qui veille sur Jane, alors que les autres insistent sur ce rôle, surtout en 1944.
Thornfield
Le château d'Edward Fairfax Rochester est toujours assez lugubre, quelle que soit la version. L'arrivée à Thornfield, la demeure de Rochester, est semblable au roman dans deux versions : de nuit, dans une ambiance assez lugubre surtout pour Stevenson (proche même du gothique) et Fukunaga qui propose une vision du château moins sinistre bien que mal éclairé. À mon sens, Zeffirelli est dans l'erreur : l'arrivée de jour, en pleine lumière, impressionne moins Jane Eyre et biaise un peu ses réactions, son ressenti par rapport à la demeure.
La première rencontre
Plus tard, une scène clé de l'histoire, est traitée de façon semblable dans les trois films : la rencontre de Jane avec le maître de Thornfield, Edward Rochester. Alors qu'elle se rend à la poste en fin d'après midi, c'est au détour d'un chemin qu'elle provoque la chute du cheval et de son employeur, qui dira qu'elle est un elfe égaré. La mise en scène de 1944 reste la plus impressionnante, Orson Welles étant le plus brusque des trois acteurs. La forte impression qu'il lui fait est très bien filmé dans deux des trois œuvres.
En 1996, elle se passe de jour et la musique pollue l'atmosphère. La scène ne peut causer une forte impression à Jane, si ce n'est la brusquerie des paroles de Rochester : de façon à peine perceptible elle entend des aboiements de chien (il s'agit de Pilot) et le galop étouffé d'un cheval, puis la chute.
En 2011, la rencontre de Jane et Rochester est pleine de mystère et de tension. La scène se passe également en plein brouillard alors que la jeune fille se fige sur le chemin en entendant des bruits suspects : une certaine frayeur fait son apparition. J'aime bien la bande sonore de Fukunaga car elle illustre parfaitement ce qu'on pourrait entendre dans la campagne anglaise à cette heure de la journée. Des oiseaux qui s'envolent à l'approche de Jane la faisant sursauter. Des cris (renards peut-être), des bruissements de feuilles, le souffle du vent, la rivière et le grincement des branches. Vraiment excellent ! On est mis dans l'ambiance immédiatement. Dans les bois, seule, Jane est impressionnable : elle est tout à coup surprise par le hennissement du cheval qui, soudain, surgit devant elle, effrayé. Il cabre et trébuche, « foulant » la cheville de son maître. À aucun moment, l'homme ne se présente à Jane comme étant le maître de Thornfield. Le spectateur comprend dès lors qui lui ménage la surprise, nous laissant imaginer un caractère un peu retors ou du moins dissimulateur.
Adèle
Au cours de son séjour à Thornfield, Jane enseigne à Adèle, la pupille de Rochester. C'est l'enfant d'une de ses maîtresses françaises et peut-être la sienne, on ne sait pas. La version la plus intéressante dans le traitement des relations entre Rochester et Adèle est celle de Stevenson. On s'aperçoit que l'homme voit sa mère à travers l'enfant et ça le révulse. La pauvre petite n'y est pour rien. En 1996, William Hurt est péremptoire et brusque avec Adèle mais moins effrayant. Il y a un rapprochement entre lui et l'enfant en l'absence de Jane. Enfin, la version de 2011 ne s'attarde pas : juste une phrase indique que Rochester n'aime pas les enfants.
L'incendie
Une autre scène incontournable du roman est l'incendie qui se déclare dans la chambre de Rochester. Jane se précipite pour sauver son maître et la version la plus réussie est sans conteste celle de 2011. Le romantisme est à son apogée et les personnages sont troublés par leur proximité. Rochester prend la main de Jane pour la remercier et s'approche avec une lenteur délibérée, pour ne pas l'effrayer. Un baiser se profile mais la jeune fille détourne la tête au dernier instant, faisant appel à sa volonté. Zeffirelli réussit aussi cette scène, avec une Jane Eyre trop timide, baissant constamment les yeux (c'est frustrant). En 1944, on frôle plus la fascination qu'autre chose.
Miss Ingram
Après le trouble ressenti par Rochester, il prend « la fuite » et rend visite à ses amis qu'il ramène ensuite à Thornfield pour qu'ils y séjournent. C'est là l'occasion d'étudier Miss Ingram, qui prétend l'aimer, mais qui n'est intéressée que par sa fortune. Et de tester Jane, pour en savoir plus sur elle. Tous ses invités en profitent pour dire du mal des gouvernantes, en présence de Jane. Celle-ci, n'en supportant davantage, s'éclipse du salon suivi par Rochester qui avait feint de l'ignorer jusque-là.
Ma version préférée est encore celle de Fukunaga, avec des acteurs qui réalisent une performance formidable : émotions mêlées (tristesse, inquiétude, curiosité, fuite) nous transpercent et nous voilà les yeux embués, tant la souffrance de Jane est mise en valeur. Bravo !
L'arrivée de Richard Mason
L'arrivée de Richard Mason va créer un événement inattendu : l'homme est blessé par un coup de couteau et Rochester demande l'aide de Jane. Cet épisode est traité à l'identique dans les trois films, la version de Stevenson étant la plus longue (environ 10 minutes contre 3 ou 4 dans les autres) et insistant sur le côté dramatique comme dans certains « films noirs » produits dans le milieu des années quarante.
Retour auprès de Tante Reed
Plus tard, Jane reçoit un message de sa nourrice Bessie qui lui apprend que son cousin John Reed s'est suicidé et que sa tante est à l'agonie. Elle demande à Rochester si elle peut s'absenter. Des trois films, seule la version de 1944 omet ce passage qui est pourtant d'une importance capitale si l'on veut comprendre la suite. En 1996, Charlotte Gainsbourg nous propose une Jane Eyre effacée, fade, triste qui exprime ses sentiments avec difficulté. Là où l'on attend des émotions, on reste avec un goût d'inachevé. En 2011, Mia Wasikowska offre le visage du pardon, de la sérénité face à sa tante qui la blâme presque pour son état. Jusqu'au bout, elle lui en veut et lui reproche « d'être née pour la tourmenter ». Mia est parfaite : elle montre de la force et en même temps qu'une grande douceur...
La déclaration des sentiments
Jane est revenue à Thornfield au grand soulagement de son maître. Lorsqu'elle lui explique qu'elle va devoir le quitter parce qu'il va se marier, il ne la détrompe pas. Il la pousse dans ses derniers retranchements, prévoyant de lui trouver une nouvelle place en Irlande. À ces mots, Jane s'effondre, expliquant qu'elle n'est pas une machine sans sentiments, qu'il va lui manquer. J'aime la façon dont Rochester/Fassbender évoque le lien invisible qui les relie. Il qualifie Jane « d'être surnaturel et rare » comparée à Miss Ingram qui est sans âme. Devant ses larmes, Rochester ne reste pas insensible et ils tombent dans les bras l'un de l'autre, s'avouant leur amour.
La version la plus touchante reste celle de Fukunaga (eh oui, encore!) bien que William Hurt ne s'en sorte pas si mal. Dommage que Charlotte Gainsbourg soit quasi impassible (alors qu'elle devrait montrer sa souffrance et ses larmes). Joan Fontaine s'en sort aussi très bien face au charismatique Orson Welles qui l'écrase presque par sa personnalité.
Le mariage et la révélation
Puisqu'ils s'aiment, ils vont se marier. Les préparatifs et la cérémonie se déroulent plus ou moins à l'identique, la présence (ou l'absence) de certains personnages différant. Jane apprend que Rochester est déjà marié à Bertha Mason, une femme démente enfermée dans une partie du château et surveillée par Grace Poole.
Jane comprend mieux les rires hystériques qu'elle entendait parfois la nuit. Comme dans le roman, Rochester conduit Jane, le prêtre et l'avoué de Mason jusqu'à elle, afin qu'ils se rendent compte de la folie de sa femme. En effet, comme un animal, elle se tapit contre le mur et dans un accès de folie, se rue sur Rochester qui doit la maîtriser. Jane est terrassée par les mensonges de celui qu'elle aime et ne peut se résoudre à rester près de lui et à l'aimer comme si de rien était.
Elle décide de partir au hasard le plus loin possible de Thornfield. Rochester comprend qu'il a commis une erreur en cachant l'existence de sa femme. Sa peine en voyant partir Jane est communicative et nous arrache des larmes. Elle s'enfuie en berline.
St John Rivers
Elle se retrouve perdue dans la lande. Cette partie de l'histoire a été totalement ignorée par Stevenson. Seules les autres versions en parlent. Elle est recueillie par St John Rivers et ses sœurs : il s'avère qu'elle apprendra qu'ils sont ses cousins.
Pendant une année, elle se tiendra éloignée de Thornfield, travaillant comme institutrice pour les enfants de paysans du petit village. Peu à peu, elle se reconstruit et tente d'oublier son passé. Mais un jour, elle entend une voix l'appeler : Jane, Jane...Elle reconnaît la voix de Rochester et décide de retourner à Thornfield malgré la demande en mariage de St John.
Retour à Thornfield
Le retour est particulièrement romanesque, plein de suspense : on ne sait pas ce qu'elle va trouver en arrivant et si Rochester voudra toujours d'elle. Elle apprend qu'un incendie a ravagé le château et que Bertha est morte en se jetant dans le vide. Dans la version de 1944, on ne voit pas l'incendie. Stevenson préfère nous montrer les ravages qu'il a causé : Mme Fairfax raconte en détails les événements devant les yeux ébahis de Jane. En 1996, Zeffirelli nous donne un aperçu de l'incendie et du courage héroïque du maître de maison. En 2011, Fukunaga l'évoque par la bouche de Mme Fairfax, qui raconte les circonstances de l'incendie de la même façon que Stevenson.
Les retrouvailles ne se valent pas dans les trois versions, même si elles sont toutes plus émouvantes les unes que les autres. En 1944, la barbe de Rochester a poussée et il a perdu la vue. Le baiser de cinéma qu'échangent Orson Welles et Joan Fontaine est très beau accompagné par le lyrisme d' Herrmann. Le plan est très rapproché, centré sur le visage des acteurs. Jane est en adoration devant l'homme qu'elle aime et lui redit son amour. D'abord incrédule, Rochester est ému de la voir si près de lui et sa voix manque de fermeté : il tremble presque devant elle. Très jolie composition d'Orson Welles.
La version de Zeffirelli nous propose cette fois un plan plus large, avec un Rochester défiguré et aveugle, échevelé, vraiment pas glamour. La scène manque de conviction, les acteurs étant trop effacés. La fougue fait défaut à Charlotte Gainsbourg lorsqu'elle s'adresse à William Hurt. Et ce dernier ne met pas suffisamment en valeur son incrédulité de la voir près de lui. Ça manque cruellement d'émotion, et je trouve que les acteurs ne sont pas sur la même longueur d'onde. De plus, l'endroit où se passent ces retrouvailles n'est pas propice au romantisme (contrairement au film de Fukunaga). Spartiate (ça c'est normal) l'endroit est sombre. Peut-être est-ce un parti pris du réalisateur afin de mettre en lumière les personnages ? D'ailleurs, la robe de Jane est claire et attire la lumière, comme si on voulait nous faire comprendre qu'elle ramène une lueur d'espoir. Ce moment est si délicat qu'il ne fallait pas le manquer. Ici, c'est le cas. Mais ce n'est que mon humble avis.
A contrario, j'ai particulièrement aimé le traitement de cette scène dans la version de Fukunaga, tendre et pleine de sensibilité avec une Jane remplie d'espoir et un Rochester incrédule de la voir revenir. C'est magnifiquement interprété, avec tendresse et sensibilité. La délicatesse de Mia/Jane complète l'hésitation de Mickaël/Rochester. Elle verse des larmes d'émotion et sourit timidement, tandis que lui montre un manque d’assurance face à la réaction de Jane par rapport à ce qu'il est devenu.
On entend des chuchotements, des soupirs assez longs comme s'il laissait comprendre son soulagement de la revoir. Ces retrouvailles se passent à l'extérieur, on l'entend et c'est important. La bande sonore de ce film est parfaite. Ce duo est tout à fait crédible et plein de charme. Un bémol cependant: qu'est-ce que c'est que cette barbe rousse !!?? Pff, côté physique, ils auraient pu faire un effort : c'est dommage. Heureusement, ça s'oublie vite, grâce à l'excellente interprétation et à l'alchimie des deux acteurs.
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Capucine (mercredi, 25 juillet 2012 11:19)
Très bon article, très intéressant, bravo.
En revanche, je te trouve très dur avec la version de Zeffirelli qui est tout de même l'un des maîtres du romantisme (n'oublions pas sa merveilleuse adaptation de Roméo et Juliette) et qui a su traiter un monstre du romantisme anglais avec pudeur, retenue, et vérité. Dans l'adaptation de Zeffirelli, l'important c'est le réalisme. La rencontre est romantique mais sans exagération ; elle est crédible. Jane n'est pas très jolie, elle est effacée tout en étant très forte psychologiquement, très loyale et juste. Il ne me semble pas qu'une interprétation exagérée aurait été adaptée à l'époque de l'action. Charlotte Gainsbourg est certes un peu "molle" parfois, pourtant on comprend ce que lui trouve Rochester tant il est bourru et rancunier. William Hurt correspond parfaitement physiquement au personnage, et son côté rustre est bien opposé à la douceur de Jane - comme deux aimants qui s'attirent.
Les retrouvailles sont belles car elles sont simples, réalistes, vraies. Ici, Hurt est brûlé comme le serait quelqu'un qui aurait perdu la vue dans un incendie et il joue à la perfection l'homme brisé qu'il est censé être. L'arrivée de Jane, toute simple, est pour lui une illusion et la voix de cette dernière complète brillamment le personnage doux et effacé qu'elle a créé.
Même si nous ne sommes pas d'accord, je trouve malgré tout ton article formidable! J'irai voir la nouvelle version ces prochains jours!
MyLoveQ (mercredi, 25 juillet 2012 11:53)
Cet article est tout à fait remarquable! :) Ces analyses sont très intéressantes, en particulier au niveau des affiches, que je n'avais jamais pris le temps d'analyser. Lorsque j'ai vu l'adaptation toute récente de Fukunaga,je l'ai trouvé très bonne, mais pas autant que celle de Zeffirelli (bien que je sois totalement d'accord avec toi quant à Charlotte Gainsbourg, que j'ai trouvé ennuyeuse et sans la moindre expression). Et pourtant, avoir lu ton article me fait me dire que je n'ai sans doute pas été assez attentive en regardant la nouvelle version... J'envisage donc de revoir cette nouvelle version pour me faire une meilleure idée :)
Valmont (vendredi, 27 juillet 2012 15:05)
Capucine, tu as raison concernant Zeffirelli: c'est un maître du romantisme mais je ne ressens pas d'alchimie entre les acteurs. Surtout, comme tu as l'air d'être au fait du roman, je te conseille (à moins que ce ne soit déjà fait) de voir Jane Eyre de la BBC 1997 avec Toby Stephens ! Là, tu vas voir l'excellence ! C'est la version que je préfère (mais ici, on ne parle pas des séries)
MyLoveQ, merci ;-) Regarde-le à nouveau mais suis le conseil que j'ai donné à Capucine: BBC 1997.
Capucine (lundi, 30 juillet 2012 11:05)
Merci Valmont, je vais le regarder avec plaisir!
Je suis allée voir le dernier il y a quelques jours. Effectivement, ton appréciation est presque la même que la mienne ; les deux personnages sont très convaincants, on a la larme à l'oeil à la fin, etc. Mais je dois t'avouer qu'au début j'étais presque hors de moi lors du passage de l'enfance de Jane. La petite fille qu'ils ont choisie n'est en rien comparable à la merveilleuse Anna Paquin. Ici, l'actrice, en plus d'être vraiment laide - je suis désolée de le souligner mais vraiment cela m'a marquée - parait juste subir la situation. Elle a de la répartie, pourtant la façon dont elle répond est tellement dénuée de toute force qu'elle apparait juste comme une banale victime, molle et sans volonté. Anna Paquin, au contraire, rendait Jane Eyre un brin insolente, et définitivement touchante pour tout le reste du film. L'enfance de Jane Eyre est aussi mieux décrite dans la version de Zeffirelli, en particulier l'amitié entre Jane et Helen. En revanche, c'est vrai que certains détails ont été ajoutés par rapport au roman, comme le passage de la coupe de cheveux qui n'est censé toucher ni Jane ni Helen. Pourtant, la mort d'Helen est mille fois plus émouvante dans la version de Z. que dans cette nouvelle version.
En fait je pense que c'est le casting enfant qui a été complètement raté dans cette dernière version - que dire d'Adèle, qui ne mériterait pas mieux qu'un rôle dans Plus Belle la Vie, étant donné son niveau d'interprétation?
Je n'ai pas non plus apprécié le passage où Blanche Ingram se moque ouvertement des gouvernantes tandis que Jane Eyre est assise juste en face d'elle. C'est moins crédible que dans la version de Z., même si l'actrice est bien mieux choisie que Elle McPherson.
Pour le reste, je suis d'accord avec toi, avec quelques réserves bien sûr. Encore merci pour ce bel article!
Lily (jeudi, 02 août 2012 21:29)
Je n'ai pas vu la version avec Orson Wellesl, mais celle de 2011 reste ma préférée. Elle respecte bien l'opposition Rochester/St. John Rivers, même si elle passe parfois trop vite sur certains épisodes.
Par contre, je me permets de corriger Valmont : la version avec Toby Stephens (qui, je confirme, est vraiment bien !) date de 2006, celle de 1997 est avec Ciarán Hinds, qui ne compte qu'un épisode, au lieu des quatre, de la version de 2006.
Valmont (samedi, 11 août 2012 13:44)
Merci Lily, c'est bien ça, 1997, j'ai confondu ;-)
Satine (lundi, 20 août 2012 02:42)
Ton article est très complet Valmont ! Vraiment BRAVO ! =D.
La version de Zeffirelli est incontestablement une des celle que j'aime le moins :(. Comme toi, je trouve que Charlotte n'est en aucun cas J.E et il n'y a AUCUNE alchimie entre elle et W.Hurt :(. Alors que c'est tout le contraire dans la version 2011 qui est tout simplement MAGNIFIQUE à mon avis =D. Malgrè quelques impotantes infidilités de la version 1944, c'est une des versions qui m'a le plus touché :).
Orson Welles est excellent et Joan Fontaine vraiment pas mal aussi ...
Par contre je pense sincéremenet que la BO de J.E 2011 est l'une des meilleure !!!! MAGNIFIQUE :p
Valmont (lundi, 20 août 2012 14:20)
Merci chère Satine !
PIQUEMAL (samedi, 15 septembre 2012 15:22)
J'ai découvert la semaine dernière le film sur arte avec Toby Stephens version 2006 je vous conseille la version anglaise la française diffusée à des coupures c'est magnifique ....
sunhillow (samedi, 16 mars 2013 00:46)
votre analyse est fine et riche.
Pour ma part, je trouve que Charlotte G. trouve dans ce film un de ses plus grands rôles. Comment la trouver impassible dans la scène d'adieu à Rochester pour se rendre au chevet de sa tante et dans la dernière scène surtout quand elle lève les yeux et suit du regard rochester qui se lève avec difficulté ?
Quant à Hurt, je l'adore et sa déclaration d'amour chuchotée balaie pour moi toutes les autres. Etudiez les changements d'émotions dans ses yeux et vous verrez qu'il n'est point besoin de hurler pour faire montrer la passion amoureuse.
A 200% pour Zeffirelli que je bénis pour toujours pour ce film et aussi pour Jésus de Nazareth!
Valmont (samedi, 06 avril 2013 10:51)
sunhillow, tous les goûts...etc...Je conçois que votre préférence aille à la version de Zeffirelli. Merci d'avoir donné votre avis, c'est important pour enrichir le débat...
Aurore (jeudi, 12 septembre 2013 18:51)
Tombée par hasard sur ce site, très bon article, très intéressant et quelle bonne analyse !!!
Si je dois chipoter, je trouve qu'il manque une version (et pas des moindres), celle de 2006 avec Toby Stephens et Ruth Wilson dont j'ai vu les 2 premiers épisodes à l'instant sur arte (les 2 derniers demain, vraiment hâte).
Et je dois dire, étonnée de cette version qui change radicalement de celle de Charlotte Gainsbourg un peu trop fade à mon goût, avec plus de profondeur et de sentiments pour les personnages, un Edward qui exprime tout ce qu'il ressent rien qu'avec ses yeux, peut-être un peu moins sinistre que dans le livre mais tellement bouleversant et une Jane timide mais aussi forte et avec une vision bien à elle des choses, exactement l'idée que je m'en faisais : forte et fragile à la fois...
En tout cas, je vous le conseille =)
valmont (dimanche, 21 décembre 2014 18:31)
Chère Aurore, il ne manque pas la version BBC car ici, sur le site films de Lover, on ne parle que de films de cinéma et pas de séries TV.
Incontestablement, la version de la BBC avec Toby et Ruth est la meilleure de toutes, la mieux interprétée, la plus fidèle au roman (quoique j'ai bien aussi celle avec Timothy...)
mo (mercredi, 29 avril 2015 20:40)
J'ai détesté la version de 2011...je n'ai pas encore vu les autres, mais vraiment cette version est si superficielle comparé au livre ! les acteurs sont mauvais !!!! je n'ai ressentie aucune émotion sinon de la gène et du dégout...
Chalouiz (mardi, 26 janvier 2016 14:20)
Je viens seulement de voir la version de Fukunaga après avoir vu les 2 autres, jusque là, pour moi c'était la version de Stevenson avec Orson Welles et rien d'autre... mais quelle surprise ! que de beauté, que d'amour dans ce film, des silences, des regards qui en disent tellement long et un paysage magnifique!
La déclaration d'amour du très charismatique Michael Fassbender juste après le mariage raté m'a transpercé le coeur et les dernières images du films m'ont vraiment émus.
Magnifique version qui reste un peu derrière celle de Stevenson mais tellement loin devant celle de celle de Zeffirelli.